Sapphô
Cantique du signe souverain
Une troupe de cavaliers, disent-ils, ou de soldats à pied,
une escadre, rien n’est plus beau
sur la terre bleue et sombre. Mais, moi, je dis :
c’est celui-là ou celle que l’on aime d’amour.
Tout aisément à chacun on peut le faire
comprendre. Sans rivale, éclipsant
en beauté les créatures mortelles, Hélène a laissé son époux,
le meilleur des guerriers.
Elle a fait voile vers Troie,
Ni de sa fille ni de ses chers parents
elle ne s’est souvenue. Hors du chemin [Cypris]
la séduisit…
... facile à courber…
... le cœur léger…
… maintenant me vient le souvenir d’Anactoria,
l’absente.
La grâce adorable de son pas,
l’éclat changeant de son radieux visage,
j’aimerais mieux les voir que vos chars de guerre lydiens
Et votre infanterie en armes.
Non ! Ce ne peut arriver..
... qu’un homme... mais prier pour le partage
... au-delà de l’attente.
Présences à Frontenay 2016, L'Oubli
Source : Odes et fragments, traduction et présentation d’Yves Battistini, Poésie / Gallimard, n° 405, repris dans Quelqu’un plus tard se souviendra de nous, Poésie / Gallimard, 2010, pp. 13-14.
Biographie
Sapphô (fin ~ VIIe -déb. ~ VIe s.) est une poète grecque. Née au sein d’une famille noble de Mytilène, dans l'île de Lesbos, elle dirige adulte une confrérie où les jeunes filles nobles apprennent le chant, la danse, la lyre et lisent les poètes. Bannie vers ~ 600, elle s’exile en Sicile puis revient au pays natal pour y finir ses jours. Ovide, dans les Héroïdes, la dépeint « petite et noire », tandis qu'Alcée, qui peut-être l'aima, évoque une « pure Sappho, aux tresses de violettes et au sourire de miel ». Sa poésie marque l'apogée du lyrisme des côtes d'Asie et des îles voisines ; ses strophes étaient chantées et accompagnées d'un instrument à cordes. Au nom de Sappho reste attachée l'idée d'amours homosexuelles car ses poèmes d'amour sont adressés à des femmes. Sources : Dominique Richard, Encyclopædia Universalis.