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Olga Orozco

Las muertes

Les morts

He aquí unos muertos cuyos huesos no blanqueará la lluvia,

lápidas donde nunca ha resonado el golpe tormentoso de la piel del lagarto,

inscripciones que nadie recorrerá encendiendo la luz de alguna lágrima;

arena sin pisadas en todas las memorias.

Son los muertos sin flores.

No nos legaron cartas, ni alianzas, ni retratos.

Ningún trofeo heroico atestigua la gloria o el oprobio.

Sus vidas se cumplieron sin honor en la tierra,

mas su destino fue fulmíneo como un tajo;

porque no conocieron ni el sueño ni la paz en los infames lechos vendidos por la dicha,

porque solo acataron una ley más ardiente que la ávida gota de salmuera.

Esa y no cualquier otra.

Esa y ninguna otra.

Por eso es que sus muertes son los exasperados rostros de nuestra vida.

 

Voici les morts dont les os ne seront pas blanchis par la pluie,

des dalles sur lesquelles n’a jamais résonné de la peau du lézard l’âpre

coup de fouet,

des inscriptions que personne ne viendra parcourir avec pour toute lumière

la transparence d’une larme ;

dans toutes les mémoires, du sable sans empreintes.

Ce sont les morts sans fleurs.

Ils ne nous ont légué ni lettres, ni bagues de fiançailles, ni non plus de portraits.

Aucun trophée héroïque ne témoigne de leur gloire, et même l’opprobre se tait.

Leurs vies ont été vécues sans honneur sur cette terre,

mais le destin leur fût foudroyant comme un coup ;

parce qu’ils n’ont pas connu ni le rêve ni la paix dans des lits d’infamie

proposés pour la joie,

parce qu’ils n’ont obéi que cette ardente loi, plus avide, s’il se peut,

qu’une goutte de saumure.

Cette loi et non pas tout autre.

Celle-là, et aucune autre.

C’est bien pourquoi leurs morts sont les visages crispés de notre vie à nous.

Présences à Frontenay 2016, Le sage et la pluie

Source : Las muertes (Les morts), 1952, in Olga Orozco, El jardín posible. Antología poética, Buenos Aires, Ed. En Danza, 2009, p. 22. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Susana Peñalva.

Biographie

 

Olga Orozco (1920-1999), nom de plume de Olga Noemí Gugliotta, est une poète argentine. Née à Toay (La Pampa), en Argentine, elle passe son enfance à Bahía Blanca, puis part à l'âge de 16 ans vivre à Buenos Aires avec ses parents. C'est dans cette ville qu'elle débute sa carrière littéraire. Elle travaille comme journaliste, employant plusieurs pseudonymes et dirige quelques publications littéraires. Membre de la génération Tercera Vanguardia, de tendance surréaliste, sa production poétique est influencée par Arthur Rimbaud, Gérard de Nerval, Charles Baudelaire, Milosz et Rilke. Un an avant sa mort, Olga Orozco reçoit le prix Rulfo, comme reconnaissance internationale de la valeur de son œuvre. Sa poésie, à la fois métaphysique et lyrique, se situe dans la ligne de la Generación del 40, en recherche inlassable du temps et des temps de la mémoire. Sources : wikipedia, Crimic.paris-sorbonne.fr.

© 2016 par Présences à Frontenay. Créé avec Wix.com

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