Francisco López Merino
Mis primas, los domingos... /
Mes cousines, le dimanche…
Mis primas, los domingos, vienen a cortar rosas
y a pedirme algún libro de versos en francés.
Caminan sobre el césped del jardín, cortan flores
y se van de la mano de Musset o Samain.
Aman las frases bellas y las mañanas claras.
Una estatua impasible las puede conmover.
Esperan la llegada de las tardes de otoño
porque, tras los cristales, todo de oro se ve...
Y vienen, los domingos, a cortar rosas... Saben
que el eco de sus voces para mí grato es.
Entre las hojas quedan sus risas armoniosas;
ellas seguramente se ríen sin saber.
Mis primas, cuando llueve, no vienen.
Dulcemente
aparto los capullos que el viento hará caer;
hago un ramo con ellos y pongo bajo el ramo
un volumen de versos de Musset o Samain...
Mes cousines, le dimanche...
Mes cousines, le dimanche viennent cueillir des roses,
me demander un livre de vers écrits en français.
Elles marchent sur le gazon, ayant coupé des fleurs
et s’en vont enlacées de Samain ou Musset.
Elles aiment les belles phrases, comme les matins clairs.
Une statue impassible peut même les émouvoir.
Elles attendent le retour des crépuscules d’automne,
parce que derrière la vitre tout est d'or habillé...
Elles viennent le dimanche cueillir des roses... et savent
combien m’est cher l’écho adouci de leurs voix.
Parmi les feuilles demeurent leurs rires harmonieux ;
Sans doute rient-elles sans rien imaginer.
Mes cousines ne viennent pas, s’absentent lorsqu’il pleut.
Je garde les boutons que le vent va faucher ;
fais un bouquet avec eux et mets sous le bouquet
un recueil de poésie de Samain ou Musset...
pour ma mère, in memoriam
Présences à Frontenay 2016, Le sage et la pluie
Source : ALas tardes (Les soirs), 1925, in Horacio Armani, Antología esencial de poesía argentina (1900-1980), Buenos Aires, Aguilar, coll. “Ensayistas hispánicos”, 1982, p. 250-251. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Susana Peñalva.

Biographie
Francisco López Merino (1904-1928) est un poète argentin dont l’œuvre, comme la vie, est extrêmement brève – il se donne la mort à l’âge de vingt-quatre ans. Étant l’ami de J. L. Borges – qui reconnaît la qualité de son écriture –, il fréquente certains des représentants de la mouvance « martinfierrista », sans être lui-même enclin à l’innovation poétique. Parmi ses maîtres on dénomme plusieurs européens : Juan Ramón Jiménez, Francis Jammes, Rodenbach… Dans ses poèmes dominent les teintes délicates et les tons mineurs (comme l’énonce l’intitulé d’un de ses recueils). Empreints de raffinement et de musicalité mélancolique, ses vers ont ainsi l’aura d’une tendresse lyrique. Il est l’auteur de trois recueils : Canciones interiores y otros poemas (1920) – qu’il renie peu après sa publication –, Tono menor (1923) et Las tardes (1925). En 1968 paraît un opuscule intitulé Obras completas, incluant des poèmes inédits. Source : Horacio Armani, Antología esencial de poesía argentina (1900-1980), Buenos Aires, Aguilar / “Ensayistas hispánicos”, 1982.