Claudio J. Castelli
gorrión de buenos aires / moineau de Buenos Aires
a daniel antoniotti
pirámides de calles y plazoletas,
poemas apretados de luciérnagas,
desgajarse de la infinitud de la lluvia
la sinrazón de un amor,
en las intimidades de un libro
encontrar la voz de ángel vargas,
un gorrión recibe la modestia de las estrellas,
la memoria es un sueño del río de la plata,
¿donde está la esquina de barrientos y barrientos?,
qué ingenuos los jazmines en diciembre,
daniel,
y cuánta nostalgia.
diciembre de 1987
À daniel antoniotti
pyramides de rues et de placettes,
poèmes serrés, comme pétris de lucioles,
la déraison d’un amour
va se départageant de la pluie infinie...
depuis l’intimité familière d’un bouquin
la voix oubliée d’Angel Vargas me revient.
l’humilité des étoiles descend sur un moineau,
la mémoire est un songe du Río de la Plata,
où se trouve le carrefour de Barrientos et Barrientos ?
qu’ils étaient naïfs les jasmins de saison...
si tu savais, Daniel,
et que de nostalgie !
décembre 1987
Présences à Frontenay 2016, Le sage et la pluie
Source : Todo y nada (Tout et rien), Buenos Aires, Ed. de la Cantiga, 1991, p. 17. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Susana Peñalva.

Llueve en las raíces / Il pleut dans les racines
me gusta La Paz cuando llueve
las alforjas y el humo de las lluvias
la calle Belgrano desde lo alto
el abismo de mujeres perdidas
las tejas de las cosas
el césped húmedo
los pasos de la vereda mojada
la cinta irrepetible de las islas
el sauce de los suburbios idos
me gusta la lluvia
La Paz cuando el agua desvanece en el río el desarraigo
la soledad de todo lo que existe
las delirantes nubes de los barcos
los barcos en la afinidad del muelle
el punto cardinal de la vigilia
la vana percepción de algunos nombres
el seco resonar de algún olvido
los ojos de las gentes
cuando llueve
averiguar si aun estamos vivos
me gusta La Paz cuando la lluvia
estimulada por tantas heridas
perdura el caracol de los años
y estalla en la aventura de los días.
enero de 1992
Il pleut dans les racines
j’aime bien La Paz comme il y pleut :
les sacoches et la brume des pluies
la rue Belgrano vue d’en haut
l’abîme de femmes à jamais perdues
les tuiles des choses
le gazon humide
le bruit des pas sur le trottoir mouillé
le ruban-archipel irremplaçable des îles
le saule sans pareil des faubourgs disparus
j’aime bien La Paz
lorsque la pluie soudaine
déverse dans le fleuve le déracinement
la solitude de tout ce qui existe
les nuages délirants que forment les voiles
les bateaux dans l’affinité́ des quais
le point cardinal de la veillée
la vaine perception de certains noms
le sec crépitement de quelque oubli
le regard des passants
lorsqu’il pleut dans ma ville
et qu’on cherche à savoir si on est encore en vie
j’aime bien La Paz comme la pluie tombe sur elle
et qu’incitée par nombre de blessures
prolonge elle-même la spirale du temps
pour éclater dans l’aventure des jours.
Présences à Frontenay 2016, Le sage et la pluie
Source : Llueve en las raíces. Trilogía poética de fin de siglo (Il pleut dans les racines. Trilogie poétique fin de siècle), ouvrage inédit, 2013, p. 84-85. Traduit de l’espagnol (Argentine) par Susana Peñalva.
Biographie
Claudio J. Castelli, (né en 1957) est un avocat et poète argentin. Né à La Paz (Entre Rio), il fait des études de journalisme et de philosophie et il est diplômé de la Faculté de Droit de l’Université de Buenos Aires. C’est un lecteur invétéré de l’œuvre de Friedrich Hegel, un fin connaisseur de la poésie argentine et un esprit dévoué aux mots et à la parole. La poésie de Castelli mise sur l’authenticité de l’expérience comme principe recteur. Il est l’auteur d’un recueil intitulé Todo y nada (1991). Source : Susana Peñalva, quatrième de couverture de Todo y nada, Buenos Aires, Ediciones de la Cantiga, 1991.