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Stéphane  Mallarmé

« Las de l’amer repos… »

Las de l'amer repos où ma paresse offense

Une gloire pour qui jadis j'ai fui l'enfance

Adorable des bois de roses sous l'azur

Naturel, et plus las sept fois du pacte dur

De creuser par veillée une fosse nouvelle

Dans le terrain avare et froid de ma cervelle,

Fossoyeur sans pitié pour la stérilité,

- Que dire à cette Aurore, ô Rêves, visité

Par les roses, quand, peur de ses roses livides,

Le vaste cimetière unira les trous vides ? -

Je veux délaisser l'Art vorace d'un pays

Cruel, et, souriant aux reproches vieillis

Que me font mes amis, le passé, le génie,

Et ma lampe qui sait pourtant mon agonie,

Imiter le Chinois au cœur limpide et fin

De qui l'extase pure est de peindre la fin

Sur ses tasses de neige à la lune ravie

D'une bizarre fleur qui parfume sa vie

Transparente, la fleur qu'il a sentie, enfant,

Au filigrane bleu de l'âme se greffant.

Et, la mort telle avec le seul rêve du sage,

Serein, je vais choisir un jeune paysage

Que je peindrais encor sur les tasses, distrait.

Une ligne d'azur mince et pâle serait

Un lac, parmi le ciel de porcelaine nue,

Un clair croissant perdu par une blanche nue

Trempe sa corne calme en la glace des eaux,

Non loin de trois grands cils d'émeraude, roseaux.

Présences à Frontenay 2016, Le sage et la pluie

Source : Poésies, Stéphane Mallarmé, Nrf/Gallimard, Paris, 1992, p. 16.

Biographie

 

Stéphane  Mallarmé  (1842-1898) est un poète français. Né à Paris d'une famille de fonctionnaires, il passe une enfance assombrie par la disparition de sa mère en 1847 et de sa sœur Maria en 1857. À vingt ans, l'année de ses premières publications, il choisit la voie de l'enseignement qui fit de lui, jusqu'à sa retraite prématurée en 1893, un professeur d'anglais « son gagne-pain obligé ». Influencé par Baudelaire et Poe, ce Parnassien idéaliste connaît en 1866 une crise intérieure qui lui fait perdre la foi, découvrir le néant. Il fonde sur cette découverte une conception radicalement nouvelle de la poésie, délaissant les procédures traditionnelles de la représentation pour un art de transposition fondé sur l'allusion ou la suggestion. Cette révolution poétique n'a guère d'échos avant le milieu des années 1880, quand Verlaine et Huysmans le font connaître à un public plus large. Le poète devient dès lors le maître du symbolisme naissant. À partir de 1883, Mallarmé organise dans son appartement rue de Rome des « mardis littéraires » qui rassemble une nouvelle génération d'écrivains, tels que Claudel, Gide, Valéry, Henri de Régnier et beaucoup d'autres. En 1887, il publie la première édition de ses Poésies À la fin de sa vie, sollicité par journaux et revues, il rassemble et de complète ses écrits. Source : eternels-eclairs.fr.

© 2016 par Présences à Frontenay. Créé avec Wix.com

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