Allen Ginsberg
Lettre à Peter Orlovsky (extrait)
I’m making it all right here, but I miss you, your arms & nakedness & holding each other — life seems emptier without you, the soulwarmth isn’t around. . . .
Bill thinks new American generation will be hip & will slowly change things — laws & attitudes, he has hope there — for some redemption of America, finding its soul. . . . — you have to love all life, not just parts, to make the eternal scene, that’s what I think since we’ve made it, more & more I see it isn’t just between us, it’s feeling that can [be] extended to everything. Tho I long for the actual sunlight contact between us I miss you like a home. Shine back honey & think of me.
Goodbye Mr. February as tender as ever swept with warm rain love from your Allen
Tout va bien ici, mais tu me manques, tes bras et ton corps nu pour nous tenir l’un l’autre – la vie semble plus vide sans toi, comme si une chaleur de l’âme était absente …
Bill pense que la nouvelle génération américaine sera raffinée et changera lentement les choses – les lois et les façons d’être, il y croit – pour qu’une sorte de rédemption de l’Amérique, qui retrouverait son âme… – tu dois tout aimer dans la vie, pas juste des bribes, pour rendre les choses éternelles, c’est ce que je pense puisque nous l’avons fait, que de plus en plus je me rends compte que ce n’est pas seulement entre nous, c’est une sensation qui s’applique à toute chose. Alors que j’aspire à ce contact radieux entre nous, tu me manques comme un foyer. Renvoie-moi ta lumière mon cœur, et pense à moi.
Au revoir, Monsieur Février, plus tendrement que jamais, lavé de pluie chaude, je t’embrasse.
Ton Allen
Présences à Frontenay 2016, Le sage et la pluie
Source : Straight Hearts' Delight: Love Poems and Selected Letters, 1947-1980, Allen Ginsberg et Peter Orlovsky, Gay Sunshine Press,U.S., 1656. Traduction Laurence le Masne.
Biographie
Allen Ginsberg (1926-1997) est un poète américain, membre fondateur de la Beat Generation. Il est le plus jeune fils d’un professeur d'anglais et poète, et de Naomi Levy Ginsberg, militante communiste, atteinte d’une maladie mentale. Adolescent, il découvre Walt Whitman et écrit des lettres au New York Times sur la Seconde Guerre mondiale, la politique ou les droits des travailleurs. En 1943, il entre à l'Université de Columbia grâce à une bourse puis rejoint la marine marchande pour gagner de l'argent et poursuivre ses études. Il y rencontre Jack Kerouac, William S. Burroughs, et John Holmes Clellon. Ensemble, ils parlent d’une Nouvelle Vision pour la littérature américaine. En 1948, Ginsberg reçoit une hallucination auditive en lisant la poésie de William Blake. Il affirme d’abord avoir entendu la voix de Dieu, puis ensuite de la voix de Blake lui-même. Le 7 Octobre 1955, à la Six Gallery, est donnée la première lecture publique de Howl, poème de renommée mondiale depuis, mais qui fut d’abord un scandale littéraire, en raison de son langage cru et explicite, et fut même interdit de diffusion après sa publication. Les années qui suivent le voient se faire l'artisan du rapprochement idéologique entre les beatniks des années 1950 et les hippies des années 1960. Il participe alors à de nombreuses manifestations : pacifistes contre la guerre du Viêt Nam, sociales contre les discriminations sexuelles, politiques avec les communistes, musicales véhiculant une spiritualité orientale stimulée par les drogues ; et effectue de nombreux voyages sulfureux (Mexique, Inde, Japon, Chine, Russie, Cuba, Maroc). Son autre œuvre majeure, Kaddish, est une longue méditation sur la mort de sa mère qui ne put avoir un Kaddish à son enterrement car il n'y avait pas dix hommes juifs présents. Son style se caractérise par sa liberté de ton, son aspect volontiers décousu, fruit d’une écriture la plus spontanée possible. Son œuvre aborde de front la sexualité, les désillusions sociales américaines et les modifications de la conscience. On lui attribue le slogan « Flower Power », abondamment utilisé par la communauté hippie. Entouré de sa famille et de ses amis dans son loft de l’East Village à New York, il meurt en 1997 d’un cancer du foie. Sources : wikipedia.com, poemhunter.com.